vendredi 16 septembre 2011

Une dernière danse

Ils se regardent
Il est tard et jamais il n'a fait aussi ni-chaud, ni-froid.
L'un parle, l'autre acquiesce
C'est comme s'il n'y avait plus de temps autre que celui inéluctable de la séparation
C'est encore un long voyage
Plein d'anthropophages

Quand il lui parle
Il actionne la boite à musique de son cœur
Une musique lente
Qui a avalé la colère, le ressentiment, les pulsions de mort
Pour laisser doucement la place à la simple tristesse

Alors il pleut rouge et orange sur l'asphalte mouillé
Plus de complexes ni de barricades
Dans un tango lent et sans empressement
Lente danse, guidée par un seul corps
Pendant que l'autre a la tête posé désespérément sur l'épaule du Vide
 
Le tango dure des heures
Et la musique lente
Tend jusqu'à la fin les airs de bravour, et la fin des temps
Pendant que son coeur bat contre ses tampes
Et que la mélancolie roucoule
Aux les larmes qui pendent du bout de ses yeux fatigués.

Que nous reste-il, de ces corps entremêles? De ces substituts d'amour?
De l'horreur du départ de l'autre?
De la douceur des pieds froids sur son corps chaud?
Que nous reste-il? "Rien".
Pense-t-il, la tête dodelinant doucement sur les murs brouillés de tous ces souvenirs.


L'Ami arrête la danse pendant que l'Amant,
Éperdu roule sous les routes des songes
Des harmonies sans pudeur et fécondes
Dans la solitude et les excroissances
Des amours furibondes.

Et qu'il ne reste plus que le ciel, absent dans tes grands yeux
Pleins de chaleur et aussi lointains
Qu'un pays qu'on ne visite jamais
Ton corps maigris, tes doutes sans cesse
Perdus dans le vague des douceurs
Ton corps maigris. Nous, maigris?
C'est à avouer et à mourir,
A chanter ou à retrouver:
Mais la Musique semble bien finie.

samedi 20 août 2011




Je soutiens sans broncher le doux regard du Monstre,
Ses grands yeux verts cyan d'azurs immaculés
Murmurent à mon cœur frôlant le grand désastre:
"Il est tant de donner sur ma bouche un baiser."

Tu fermes les yeux, et c'est encore la vision de cet immense ciel vert plein d'étoiles
Et le chant des sirènes, le réveil des Morts qui dansent joyeux sur la plage
Et les traces de pas des Monstres sur le sable.

Dans la Grande salle pleine de corps qui brûlent
Il y a des Monstres qui fument des gitanes
Qui ont tous égaré la Voix et la Raison,
Qui changent de visage à chaque pulsation
 Ces rythmes infernaux, c'est ces talons des femmes
Qui folles de désespoir cuisent dans leurs cellules
Courant dans leur misère dévorées par les flammes.

On les a placé là parce qu'ils ne sont pas beau
Mais la laideur franche a ce côté étrange
Attirant et velu qui les tient vers le haut
Donnant aux masques hideux des traits pareils aux anges

Les Monstres sont partout pour qui veut bien les voir
Ils poussent comme les fleurs sous la lune et la pluie,
Ils viennent voir dormir quand on est dans son lit
Quand du fond de son cœur on ne veut plus y croire

Tu fermes les yeux, et c'est encore la vision de cet immense ciel vert plein d'étoiles
Et le chant des sirènes, le réveil des Morts qui dansent joyeux sur la plage
Et les traces de pas des Monstres sur le sable.




Celui-ci poussait des grognements
Car des cornes lui poussent rapidement
Au dessus de ses yeux bleus de femme
Et de sa bouche d'enfant

Que je te prenne entre mes mains
Te regarde dans les yeux et te dire
Que tu es très bien
Que tu es tout!
Et tu ne dis rien.
Rien
Mais tout autour
De moi, de nous
Alors que nous piétinons avec frénésie
Il y a des Monstre dans nos armoires
Et dans nos vies

Si ces Monstres là sourient
Alors moi aussi.



Tu fermes les yeux, et c'est encore la vision de cet immense ciel vert plein d'étoiles
Et le chant des sirènes, le réveil des Morts qui dansent joyeux sur la plage
Et les traces de pas des Monstres sur le sable.



Si ces Monstres là sourient
Alors moi aussi.









Pour toi Démocratie



Oui, je ferai ce continent inaltérable
Ferai la plus splendide race sur laquelle le soleil ait brillé
Ferai cette terre divine magnétiquement,
Par l'amour des camarades,
Par le fidèle amour des camarades.

Je planterai communauté de compagnons aussi drue que les arbres sur les rives des rivières d'Amérique, sur les rivages des grands lacs, à la surface des prairies,
Je rendrai les cités indénouables avec leurs bras au cou l'une de l'autre,
Par l'amour des camarades
Par le viril amour des camarades

Pour toi, Démocratie, par te servir ma femme!
Pour toi, mes chants, mes chants trillés.

Walt Witman, Leaves of Grass

mercredi 6 juillet 2011

Karaoké




Ils étaient tous les deux dans une salle de karaoké. Les lumières étaient tamisées, violettes, rouges, jaunes, et les enceintes perçaient les oreilles avec des bandes sons bon marchés.
Il y en avait un qui pleurait. Au fond, assis sur le sofa. Il pleurait comme la pluie tombait du dehors, et doucement sur tous les murs de la salle. Il pleurait autant qu'il chantait.

Au Karaoké, chanter juste n'importe pas vraiment. Ce qui importe c'est la conviction. On parle souvent d'amour dans les karaokés: cette chanson obsédante.

Pas besoin de réfléchir beaucoup: il suffit de feuilleter les pages du livre, d'appuyer sur les boutons pour entendre parler d'amour.

Ils sont très beaux. La peau mâte, les yeux en amande, à la fois maigres et musclés, vêtus de jeans serrés et de chemises légères. Et ils chantent.

On peut chanter dans diverses langues: les langues se rejoignent toutes pour parler d'Amour, l'universelle préoccupation. Cette chanson obsédante.

L'autre jeune homme était assis de l'autre côté du divan. Tout aussi triste. Partir: partir si vite, alors que les liens ont eu si peu de temps pour se faire. Les cheveux mouillés et les joues humides: les reflets bleus des néons. Il lève le micro pour chanter aussi.

Entre les êtres s'écoulent  des longueurs et des lenteurs, des incompréhensions et de la pudeur. Qu'il chante d'un micro à un autre, qu'une femme se glisse dans la danse pour donner des courbes, de la rondeur et du gris dans un monde tout noir...toujours ce flux entre les êtres, même les ceintures s'entrechoquant, sur le divan.

La belle callypige ou l'homme ombrageux: dans le chant nous sommes tous égaux dans la cucugnerie.

Seul l'amour résonne à nos oreilles, cette chanson obsédante.

Le vide provoque l'amour qui recherche sans pudeur la meilleur déclinaison pour ne pas sécher trop vite. Pour que la chanson dure le plus longtemps possible.

Et si on revient en arrière, le beau jeune homme faiblit, il lève le micro, le front trempé par l'eau qui coule dans la salle si grande pour seulement deux personnes.

L'autre danse avec la femme. Mais ils vont s'échanger la femme, et la femme va même s'éclipser. L'Amour, cette chanson obsédante.



"Đã không còn người yêu hỡi, ngày xưa ấy đôi ta bên nhau không rời
Ngồi trên cát nhìn biển đêm, hát vu vơ mấy câu tình ca...
Trái tim buồn vì thương nhớ, vì đau xót sao đôi ta mau chia lìa
Đời giông bão nhiều đắng cay, cuốn trôi mau biết đâu tình nồng !!!

Thì thôi em đừng mong nhớ, đừng thương tiếc chi thêm đau lòng
Tình chúng ta đã phôi pha, em và anh mỗi người 1 nơi...
Ngồi nơi đây mình đơn côi, vầng trăng khóc sao rơi sông dài
Tiếc cho tôi, tiếc cho người và cho bao yêu thương đã trao
Gió đông buồn ...."

Rien n'est moins clair que le Karaoké.

mercredi 15 juin 2011

空が青い

夕方の空が青い、

詩も青い、

目も青い、

空はおかしに青い目の女みたいなあ

あれに話してる時、まだ答えない。

聞こえないかも
話せないかも
男の人が好きじゃない女かしら。

その人は日本語で書かれる詩ですけれども
読むのが難しい、
読むのが面白い、
ハノイの青い夕方の空みたいから。

青い夢でしょう。

青い詩でしょう。

夕方の空が青いんだよ。

jeudi 9 juin 2011

ただ会いたくて...


Il y a ton bras
Et je sens ta main
C'est étrange
Cette douce insomnie
De voir qu'il y a un univers qui dort là
Doucement, qui se soulève comme la mer
Qui dort paisiblement.

Tes yeux se mélangent dans le grand hasard
Visage parfait, complètement vague dans le gris clair des villes
Je ne me suis jamais vraiment senti appartenir
A quoi que ce soit, à qui que ce soit.

Et tes lèvres murmurent des paroles sans mensonges
L'étonnant visage dans la nuit
Celui qui est toujours beau
La presque-toujours-absente
Les voix d'outre tombe chantent pour cet amour décomposé en rêve
Et en rivages

N'y a t'il que nous pour sentir
Que l'Amour est un champ de bataille,
Où les bras, les jambes, les corps comme des épaves
S'écroulent transpirants les uns sur les autres?

Et il n'y a que nous, mon amour
Pour voir que le vent efface les traces dans le sable,
Où tes yeux,
Ô ma belle sans visage
A peine au large du vide
Aussi proches que lointains
Dans mes yeux font naufrage.

vendredi 27 mai 2011

Rainbowarriors

When you are 22, you eventually make up your mind to take up arms, to wear the gear, to wear the red gear, to wear the blue gear, to wear the white gear, rainbow-coulour gear maybe, whatever the gear...the coulour does not count.

What is important is actually to take up arms for something.

When I enter this kind of places, I can feel the same smell. The smell is the same in every countries: smells like candy, smells like girls, smells like boys. Smells so queer.

They are not rainbowarriors yet.

Dancing in the middle of the blue sky of the night, reflected on the dancefloor. Honey between the fingers. Faded stars in the eyes. Butts moving like snakes. Boys runing away from masculinity. Oversexualized girls. Giant rabbits. Lost fairies. Lovers from London or Tôkyô. "Living-with-the-beats" geeks. "Criminal queers". In a place away from the usual norms, where boys can dance like women, can even dance with women, and like them put their hand in their hair, moving their butts to get it down.

Swallowing between each other, looking hopelessly for an answer when this one is only Love.

Imitating an American standard, on American music, finding an American identity: maybe the only way to run away from the closet created by the weight of culture?

This is a unique parade: parade in Ni-chome, parade in Itaewon, parade in GC Hanoi. Parade everywhere, at the same time festive and hidden. A parade moving in a ghetto, kindly created to tame them more. Inventing rules to tame them more.

But we are all potentially beautiful, whatever we love: eating apples or pears. Every single face is potentially beautiful. Universal? Looking at the sky, for the shouting stars that will fulfill the best of human being dreams? Our faces are painted and wait to be kissed and cherished.

I believe that, as long as things will move on, there will be neither girls or boys anymore on the dance floor. Just rainbowarriors.

mercredi 25 mai 2011

La Maison de Mon Rêve

Dans mon jardin, qui est un jardin imaginaire, il y a de vraies grenouilles qui croassent. Elles parlent Anglais, Japonais, Vietnamien. Elle parlent et n'écoutent rien. Et le soleil se lève et fait perler la rosée. C'est le jardin de ma Maison.

Il y a des nuances de bleu et de gris dans le ciel de Mercredi quand le soleil se lève.

Je suis un ouvrier. J'ai de la couleur rouge et verte sur le visage, les manches de ma chemise blanche retroussées, un pantalon-jean taché et troué par la peinture et le temps, une boite à outil dans la main gauche, un pot de peinture dans la main droite. La grande bâtisse est devant moi, et j'entends derrière moi le murmure des grenouilles.

Quand j'entre dans la Maison, j'entends de légers "beats" qui battent frénétiquement. Je m'avance dans le living room, puis dans le grand salon où toutes les fenêtres sont fermées. Des lumières bleues et vertes, et des gens qui dansent, au rythme des pulsations du sol.

Ils ont de la peinture sur le visage ou portent des masques. Et ils rient, ils rient, parce qu'il n'y a que la joie qui fait avancer le Monde.

Je monte les escaliers de la Maison. Il y a des fleurs mauves agrafées au mur blanc, des soupirs de femme, des gémissements d'hommes, et une odeur de maïs grillé, qui croque entre les dents.

Dans cette Maison, qui est un grand Théâtre, j'aime à me dire que je suis un Enfant, qui joue et saute à travers les flaques d'eau, même sur le bord du Mékong. "Pourquoi ne veux tu pas devenir un adulte?" me dit-on. Parce que quand on entre dans le monde des adultes, on pense, comme Charlot que:
                                         
"We think too much and feel too little."

Alors cette Maison est politique: elle a une porte pour acceuillir beaucoup d'invités, des fenêtres pour voir le ciel, un jardin pour que les enfants jouent, et une cheminée qui laisse échapper une douce fumée argentée.

Au dernier étage, je vois les trous qu'il y a au plafond. Je lève mon oeil bleu et mon oeil vert. Je sors ma boite à outil, celle qui m'a servi à construire cette parade spéciale. Je me retrousse les manches (que j'avais déjà retroussées, et donc je me retrousse la peau).

Et je répare, et je construis la Maison de mon Rêve.